mardi 2 septembre 2014

Quand National Geographic se fait le relais d'une propagande anti-chrétienne, anti-américaine et anti-israélienne

par Phyllis Chesler



Article paru sur le site Pajamas Media le 18 mai 2009

Les menaçantes manifestations de rue contre Israël, les résolutions anti-israéliennes rageuses de l’ONU, les appels obsessionnels au boycott d’Israël dans les universités occidentales, la succession incessante des gros titres condamnant Israël dans les médias du monde entier font maintenant partie d’un train-train habituel auquel participent surtout les jeunes et les fanatiques. La plupart des citoyens y font à peine attention. Ils se préoccupent plutôt de leurs emplois, de leurs prestations sociales, des frais de scolarité de leurs enfants – ou bien de l’ascension et de la disgrâce des stars dont la vie décadente les distrait de leurs propres petites misères ordinaires.

Ce qui m’inquiète davantage, ce sont les spectacles qui influencent insidieusement et inexorablement l’opinion publique, les films qui présentent les dictateurs et les terroristes arabes sous des traits séduisants et qui diabolisent les soldats, les « colons » et les hommes politiques israéliens. Progressivement, de façon presque imperceptible, l’homme de la rue a ainsi fini par croire que le monde musulman est pacifique, accueillant et sûr, que ses aspects « rudes » s’expliquent par le fait qu’il s’agit de peuples ayant été opprimés par les Européens, que le terrorisme islamique a sans doute été provoqué par l’invasion de l’Afghanistan, de l’Irak et du Pakistan par les États-Unis, qu’une grande partie de tout cela est la faute d’Israël – ou plus exactement, que la plupart de ces problèmes pourraient être résolus aujourd’hui si seulement l’Amérique sacrifiait Israël au nom de la paix mondiale et de sa propre survie.

Prenons le fameux magazine National Geographic, qui fait la promotion de la protection de la planète et qui revendique près de huit millions de lecteurs. Par suite d’un abonnement cadeau, je le reçois régulièrement. Parfois je l’ouvre, souvent je ne l’ouvre pas. Tant de belles photos brillantes, si peu de temps. Mais le dernier numéro a attiré tout de suite mon attention, à cause du titre en couverture « L’Exode chrétien de la Terre Sainte ». Par exemple, me suis-je dit, ce magazine ami des animaux a « compris un truc » ! Un espoir s’éveillant en moi, je suis allée lire l’article intitulé « Les fidèles oubliés : les chrétiens arabes ».

Voici ce que dit cet article : pour l’essentiel, il rend les croisés, les chrétiens américains et Israël (!) responsables de la persécution et de la disparition des chrétiens arabes au Proche-Orient. Je n’aurais pas pu l’inventer. Les mensonges, les omissions, le parti-pris, tantôt insidieux tantôt manifestes, y sont stupéfiants. Par exemple, cet article, rédigé par Don Belt, n’explique pas pourquoi il y a eu des croisades – à savoir, pour empêcher que les Arabes chrétiens soient assassinés ou convertis de force par les musulmans. Toujours est-il que selon Belt, « l’ironie est que c’est pendant les croisades (1095-1291) que les chrétiens arabes, assassinés par les croisés en même temps que les musulmans et pris entre les tirs croisés de l’Islam et de l’Occident chrétien, ont commencé ce long et progressif déclin vers le statut de minorité. »

Là, il y a quelque chose qui ne va pas. Comment Belt en arrive-t-il à occulter la conquête arabo-musulmane d’un Orient chrétien et juif ? Selon l’éminente spécialiste Bat Ye’or, par exemple (citée par Andrew Bostom dans son excellent ouvrage The Legacy of Jihad),

« Abou Bakr entreprit l’invasion de la Syrie (Syro-Palestine) que Mohammed avait déjà envisagée [...] la région de Gaza tout entière, jusqu’à Césarée, fut mise à sac et dévastée durant la campagne de 634. Quatre mille paysans juifs, chrétiens et samaritains qui tentaient de défendre leurs terres furent massacrés. Les villages du Néguev furent pillés par Amr B. al As […] dans son sermon de Noël de l’an 634, le patriarche de Jérusalem, Sophronius, se plaignit de l’impossibilité de se rendre en pèlerinage à Bethlehem […] Sophronius, dans son sermon du jour de l’Épiphanie de l’an 636, déplora la destruction des églises et des monastères, le pillage des villes, les champs dévastés […] des milliers de gens périrent en 639, victimes de la famine provoquée par ces destructions. Selon le chroniqueur musulman Baladhuri (m. en 892 ap. J-C), 40 000 Juifs vivaient dans la seule ville de Césarée au temps de la conquête arabe, après laquelle toute trace d’eux fut perdue. »

Se fondant sur des sources savantes, Bostom raconte de façon méthodique et exhaustive le pillage systématique, par les musulmans arabes, de l’ensemble du Proche-Orient accompagné de l’asservissement et de l’assassinat des chrétiens et des Juifs. Ce que Don Belt oublie de mentionner, même de façon subsidiaire, c’est que la persécution des chrétiens par les musulmans arabes pendant plus de quatre siècles est précisément ce qui a entraîné les croisades.

Certes, certains califes se montrèrent parfois cléments envers leurs populations dhimmies ; un gouverneur égyptien accorda l’asile au grand savant et philosophe juif Maïmonide, lequel n’en fuyait pas moins les musulmans d’Espagne. Maïmonide devint son médecin particulier. Le Sultan turc accorda l’asile à Donna Gracia HaNasi, cette femme fabuleusement riche qui fuyait les persécutions perpétrées par les catholiques en Espagne et au Portugal. Mais pour l’essentiel, les Juifs menèrent une existence extrêmement misérable et précaire et ils furent régulièrement assassinés, emprisonnés et rançonnés ou exilés et virent leurs biens confisqués. La plus grande histoire de réfugiés du Proche-Orient, jamais racontée à ce jour, est celle des Juifs des pays arabes fuyant les persécutions dont ils étaient victimes de la part des musulman.

Aujourd’hui même [le 18 mai 2009], M. Naguib Gibraeel, président de l’Union égyptienne de l’Organisation des droits de l’Homme (EUHRO), a écrit à la première dame d’Égypte pour exiger une intervention d’urgence « afin de sauver les chrétiens d’Égypte de l’islamisation forcée ».

Mais continuons. Après avoir reproché aux croisés (!) d’avoir assassiné les Arabes chrétiens par mégarde, Belt poursuit en accusant l’Israël actuel (!) de persécuter les chrétiens. Sans jamais mentionner le fait que les terroristes palestiniens aient pris l’habitude de transformer les églises les plus sacrées en W.-C., d’y entreposer des armes et d’y séquestrer des otages, Belt cite un chrétien arabe de Bethléem attribuant la responsabilité de ses malheurs au « mur géant [israélien] » et à une bureaucratie israélienne lui interdisant de vivre avec sa femme, citoyenne israélienne, à Jérusalem.

Cela ressemble à l’apartheid en Afrique du Sud, non ? Ce qui est totalement occulté, c’est l’épouvantable réalité du terrorisme et des fabriques de propagande et d’incitation à la haine qui existent dans les villes et les villages de toute la Judée-Samarie – des villes et des villages qui sont entièrement « judenrein ». Les Juifs ne peuvent pas s’y rendre alors même qu’ils y ont des lieux saints et les chrétiens ne peuvent plus se rendre sans risque sur les leurs, ces lieux de culte étant sous domination musulmane. Ce n’est donc que pour des raisons de sécurité que les autorités israéliennes, si décriées, imposent des restrictions aux voyageurs. Ces restrictions n’ont rien à voir avec la couleur de peau ni avec la religion. Le gouvernement israélien a d’ailleurs laissé au Waqf islamique le contrôle total du Mont du Temple et du Dôme du Rocher à Jérusalem. Aucun gouvernement arabe ni palestinien n’a jamais laissé aux chrétiens ni aux juifs le contrôle total des lieux saints chrétiens et juifs. Au contraire, ils ont pillé et détruit ces lieux, ils ont parfois construit des mosquées par-dessus, ils ont interdit aux chrétiens et aux juifs de prier dans les ruines et dans les bâtiments laissés intacts, ou leur ont parfois permis d’y prier mais à leurs risques et périls.

Les autorités israéliennes privent-elles d’eau, réellement, un quartier arabe chrétien ? D’après mes sources, il n’existe même pas de quartier arabe chrétien à Jérusalem et l’eau n’y est jamais coupée pour être redirigée vers « les implantations » : qu’est-ce donc que cet appel au meurtre auquel Belt se livre ? Bien sûr, selon l’informateur de Belt, ces barbares d’Israéliens couperaient l’eau exprès le dimanche de Pâques dans un secteur non précisé afin que « Marc » (ce n’est pas son vrai nom, mais l’information qu’il donne n’est pas davantage vraie) ne puisse pas laver sa voiture avant d’emmener sa famille à l’église.

Après les croisés et les Israéliens, le troisième groupe que Belt rend responsable de la disparition des chrétiens arabes de la Terre Sainte, ce sont… les chrétiens américains ! Belt cite Razek Siriani, qui travaille pour le Conseil des Églises du Moyen-Orient à Alep, en Syrie.

Voici ce que déclare Siriani, (sous la contrainte, pourrais-je ajouter) :

« Nous sommes complètement dépassés et submergés de protestations, déclare-t-il. Les chrétiens occidentaux ont aggravé la situation », affirme-t-il, se faisant l’écho d’un sentiment exprimé par un bon nombre de chrétiens arabes. « C’est à cause de ce que les chrétiens en Occident, menés par les États-Unis, font en Orient », ajoute-t-il, dénonçant les guerres en Irak et en Afghanistan, le soutien américain à Israël et les menaces de « changement de régime » de l’administration Bush. « Pour beaucoup de musulmans, et surtout pour les radicaux, cela ressemble à une répétition des croisades partout, à une guerre contre l’islam menée par la chrétienté. Du fait que nous sommes chrétiens, ils nous voient aussi comme leur ennemi. Nous sommes coupables par association. »

Apparemment, aussi bien Don Belt que Razek Siriani semblent totalement ignorer que dans ces régions, le djihad, le génocide et l’apartheid religieux ont toujours été la spécialité de l’islam et la marque d’un impérialisme musulman caractérisé par l’esclavage, le vol et le pillage.

Belt trouve donc le moyen de condamner les croisés, puis les Israéliens, puis les chrétiens américains qui sont pro-israéliens et qui, de façon bien compréhensible, seraient considérés par les musulmans, gens tout à fait pacifiques et amicaux, comme les nouveaux croisés. Belt va plus loin. Il rend les chrétiens libanais, qui se sont défendus contre les gangsters et terroristes palestiniens, responsables de la recrudescence des attitudes antichrétiennes dans le monde musulman. Il présente les chrétiens libanais comme de dangereux hommes en armes, or on ne voit aucune photo des hommes du Hezbollah et de l’OLP, bien mieux armés encore et ô combien plus dangereux, qui ont terrorisé le Liban et qui l’ont occupé.

Belt va plus loin encore : il nous montre une foule de fidèles chrétiens rassemblés le dimanche de Pâques à Jérusalem, à l’Église de Toutes les Nations, près du jardin de Gethsémani, en train de piétiner quasiment Nadia, une mère chrétienne arabe israélienne (la femme de « Marc ») et son bébé dans sa poussette, comme des barbares. Ces pèlerins étrangers (venus d’Europe, des États-Unis, d’Amérique du Sud et d’Afrique) n’ont tout simplement pas vu qu’il y avait un bébé dans une poussette et ils se sont mis à se pousser avec acharnement vers ce qu’ils croyaient être un espace laissé vacant. Quand Nadia a tenté de se sortir de là, ces mêmes affreux chrétiens « n’ont pas su réagir en voyant cette frêle femme arabe se diriger dans la mauvaise direction […] » Nadia s’exclame : « Vous voyez comment c’est ? […] c’est chez nous. Et c’est comme si nous n’existions même pas. »

Est-ce que ni Belt ni Nadia n’ont jamais entendu parler de la façon dont les pèlerins musulmans piétinent à mort leurs semblables quand ils tournent autour de la Kaaba, à la Mecque ? Pourquoi ce quasi piétinement impliquerait-il un complot chrétien ou israélien ?

Quels sont les seuls à ne pas être « accusés » ni rendus responsables, ou si peu, de la persécution des chrétiens hier et aujourd’hui, une persécution ayant provoqué une diminution considérable du nombre de chrétiens au Moyen-Orient ?

Les musulmans, bien sûr, qui selon Belt auraient toujours vécu en paix avec les chrétiens et les juifs au Moyen-Orient. Belt nous montre même des scènes touchantes de musulmans priant sur des lieux de pèlerinage chrétiens pour que se produisent des miracles. En Syrie, Belt cite une mère, Miriam, dont la famille « était chrétienne » (on se demande pourquoi ils se sont convertis) et qui, aujourd’hui, déclare : « Je crois en les prophètes : musulmans, juifs et chrétiens. Je crois en Marie, je suis venue ici pour que mon fils guérisse. » Belt présente les conversions forcées à l’islam comme des choix anodins et libres, pour des raisons en partie économiques et souvent « pour avoir un lien plus personnel avec Dieu » par opposition à un lien possible uniquement via une médiation en raison des « hiérarchies oppressives de l’Église byzantine. »

Le magazine National Geographic serait-il passé sous la dépendance juridique ou financière de l’Arabie saoudite ou de l’Iran ? Je me pose cette question parce que, de façon frappante, sa ligne politique en ce qui concerne le Moyen-Orient semble similaire à celle de ces deux régimes.

Alors, vais-je adresser un courrier de protestation à National Geographic ? Non, car CAMERA (Committee for Accuracy in Middle East Reporting in America) s’en charge depuis 1996. Je ne le savais pas, mais ayant lu l’article de Belt, j’ai commencé à rechercher les articles que National Geographic avait déjà publiés sur le Moyen-Orient. J’ai ainsi appris que CAMERA avait analysé les partis-pris de ce magazine et avait déjà demandé à ses responsables de reconnaître que leurs travaux étaient incorrects, faux, très tendancieux et carrément bourrés de mensonges. CAMERA leur a indiqué les articles et les passages en question, et à chaque fois, ils ont maintenu leur version des faits et ont refusé d’y apporter le moindre changement, de se remettre un tant soit peu en question, de s’excuser et d’écrire des articles ne comportant pas un parti-pris anti-israélien flagrant.

Toutefois, j’espère que mes lecteurs, avant de renoncer à leur abonnement, écriront au magazine pour protester contre ces appels au meurtre et contre cet article incroyablement anti-américain, antichrétien et anti-israélien de Belt.

Un courrier peut être envoyé à l’adresse suivante :

Chris Johns, Editor in Chief, National Geographic, 711 5th Ave. New York, NY 10022, États-Unis
ngsforum@ngm.com

Phyllis Chesler est professeur émérite en Psychologie, en Etudes Féminines et en Psychothérapie à la City University of New York, expert près les tribunaux et auteur d'une douzaine d'ouvrages dont le best-seller mondial Les femmes et la folie (Payot, 1975, rééd. 2006) et Le nouvel antisémitisme (Eska, 2005).

Avec l'aimable autorisation de l'auteur


© 2009 - Phyllis Chesler
© 2009 - Marcoroz pour la traduction

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