jeudi 21 août 2014

Un peuple disproportionné

par Yashiko Sagamori

Dans les premiers moments de la guerre d’Israël contre le Hezbollah, alors que tout le monde était d’accord pour qualifier de « disproportionnée » la réponse israélienne à une nouvelle série d’agressions arabes quotidiennes et meurtrières, je me suis soudain rendu compte que les Juifs, à tous égards, étaient une nation extrêmement disproportionnée. Bien qu’une personne sur quatre cents seulement soit juive sur cette Terre, nous exerçons une telle influence sur tout ce qui arrive sur cette planète que la plupart des gens croient sincèrement que nous contrôlons le monde par le biais de quelque conspiration sioniste maléfique.

Nous sommes sur-représentés de façon disproportionnée dans pratiquement toutes les activités humaines, depuis la liste des lauréats du prix Nobel jusqu’à la fréquentation des chambres à gaz d’Auschwitz. Notre contribution au bien-être du monde est disproportionnée de façon grotesque, et la haine avec laquelle le monde nous répond est encore plus disproportionnée.

Ces derniers jours, ces derniers mois, ces dernières semaines, les Juifs ont été répétitivement accusés d’assassiner des Arabes, alors que ces derniers étaient en réalité assassinés par d’autres Arabes. Ainsi, par exemple, quelqu’un se souvient-il encore de cette famille arabe tuée dans une explosion sur une plage, quelque part à Gaza ? C’est arrivé juste avant que ne commence vraiment la dernière phase du conflit. Pendant les quelques jours qu’il a fallu pour prouver sans l’ombre d’un doute que l’explosion n’avait pas été provoquée par l’artillerie israélienne, le monde entier s’est mis à déplorer avec enthousiasme les nouvelles victimes civiles innocentes de ces Juifs assoiffés de sang. Dès qu’il est devenu évident que l’explosion avait été provoquée par une mine laissée sur une plage publique par des Arabes et qu’Israël était donc innocent de cette tuerie d’un genre particulier, on a tout de suite oublié aussi bien l’événement que les victimes.

Ce fait divers étant tout sauf unique, la raison pour laquelle ce sont les Juifs et personne d’autre qui ont tué Jésus devrait être évidente. Aujourd’hui encore, si quelqu’un parvenait à prouver que Jésus a été tué par des Arabes (ou par des Nord-Coréens, par des Cubains ou par le KGB, ou par les Khmers Rouges, ou par les Hutus, ou par n’importe qui d’autre sauf les Juifs, par les Romains par exemple), ce serait la fin du christianisme. En l’espace d’une semaine, plus personne ne se rappellerait qui était Jésus, malgré le nombre de tables qu’il a pu faire valser au Temple. N’importe qui peut tuer, mais ceux qui sont (prétendument, prétendument !) tués par des Juifs deviennent automatiquement des martyrs, des saints, et même quelquefois, surtout si la victime se trouve être juive (vous ne pensiez tout de même pas que Jésus était un anglican ni un orthodoxe russe ?), les dieux des autres peuples.

Ça, c’est disproportionné.

Mais faisons un peu de théorie. Imaginons qu’au lieu de plaire aux antisémites, les Juifs décident de réagir à chaque agression de façon proportionnée. Dans le monde actuel, les pires anti-juifs, les assassins de Juifs les plus avides, sont les musulmans. Ils sont plus nombreux que les Juifs dans une proportion d’environ cent contre un. Par conséquent, si nous voulions respecter les proportions, chaque fois qu’un musulman fait du mal à un Juif, nous devrions faire du mal à cent musulmans.

Ainsi, par exemple, quand les Arabes ont détruit le tombeau de Joseph et assassiné le rabbin Lieberman qui tentait de sauver quelques-uns des livres qui y avaient été conservés, les Juifs auraient dû détruire cent mosquées d’importance historique comparable et assassiner cent mollahs. Cela, en plus de reprendre le tombeau de Joseph et de faire en sorte qu’aucun Arabe ne puisse plus jamais s’en approcher à portée de fusil.

En représailles contre l’attaque terroriste récente à Seattle, nous aurions dû attaquer cent associations musulmanes sur le sol américain, tuer cent femmes musulmanes et en blesser cinq cents autres, dont trois cents grièvement.

Comment Israël aurait-il dû réagir à l’assassinat de Tali Hatuel, une Israélienne enceinte, et de ses quatre filles, Hila, Hadar, Roni et Mirav ? En mettant à mort cent femmes arabes enceintes ainsi que quatre cents de leurs mignons petits enfants.

Quand la foule cannibale de Ramallah a littéralement mis en pièces deux réservistes israéliens, Vadim Norzhich et Yosef Avrahami, Israël a envoyé un hélicoptère bombarder le commissariat dans lequel la tuerie avait eu lieu. Comme d’habitude, la réponse israélienne a été qualifiée de disproportionnée, bien que les lâches auxquels il était fait référence aient veillé à ce que le bâtiment soit vide au moment des représailles. Quelle aurait été une réaction proportionnée à cet assassinat ? Rassembler deux cents jeunes Arabes du quartier, les attacher, les aligner dans la principale artère de Ramallah et faire passer lentement un bulldozer sur eux. Si cela vous paraît inhumain, il suffit de leur donner de la Novocaïne avant d’utiliser le bulldozer.

Ça vous effraie ? Détendez-vous, mes chers lecteurs, je ne suis pas en train de vous proposer de le faire pour de vrai. Je m’adresse aux Juifs. Quand vous décidez de faire régner la justice, vous écrivez une lettre anonyme aux autorités compétentes ? Moi, je vous propose quelque chose de complètement différent. Ce que je veux dire ici, c’est qu’une réaction véritablement proportionnée aux atrocités arabes aurait eu un effet comparable à celui des deux bombes atomiques lâchées sur le Japon, les radiations en moins. Elle aurait mis définitivement fin à la guerre des Arabes contre Israël, et c’est donc la politique qu’aurait dû adopter le gouvernement israélien depuis le jour où les Arabes se sont promis de détruire Israël.

Au passage, une petite – très petite – dose de ce remède terriblement amer aurait sauvé, à long terme, des milliers et des milliers de vie, chez les Juifs comme chez les Arabes, tout comme Hiroshima et Nagasaki ont sauvé environ un million de soldats américains et pas moins de trois millions de civils japonais.

En réponse à mon raisonnement tout à fait limpide, je m’attends à une petite avalanche de courriers électroniques me traitant de nazie et me comparant défavorablement à divers dignitaires du Troisième Reich. Voilà ce qui me rend perplexe : pourquoi tous ces gens ne dirigent-ils jamais leur juste colère contre ceux qui travaillent ostensiblement à faire advenir la prochaine Shoah ? Comme c’est terriblement disproportionné de leur part !

Enfin, à propos de la Shoah – je parle de celle qui a déjà eu lieu – qu’aurait été selon vous une réponse proportionnée à cela ?


Yashiko Sagamori est consultante en informatique à New York.

© 2006 - Yashiko Sagamori - middleeastfacts.com
© 2008 - Marcoroz pour la traduction

2 commentaires:

  1. Pourquoi n'y a-t-il plus un seul commentaire ici alors que vous vous targuiez de "innombrables réactions des internautes à la publication du texte « Un peuple disproportionné » [de Yashiko Sagamori - NdT]" ?

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  2. Je ne me targue de rien du tout. C'est l'auteur qui parle de ces innombrables réactions, provenant de son lectorat anglophone. Les commentaires en question ont sans doute été publiés, à l'époque, sur le site américain de l'auteur.

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